Le Prince, sans rire
Tu auras beau trépigner, hurler derrière ma porte comme un loup enragé, me maudire jusqu'à la septième génération et me promettre tantôt un week-end de rêve dans un château pour deux personnes, tantôt les flammes de l'enfer, non non et non, je ne te le prêterai pas.
Quand j'ai vu à travers le sac en plastique qui lui servait d'emballage, idéal écrin de sa modestie - comment ne pas entrevoir aussitôt le futur roi magnanime et bon, rendant la justice au pied d'un château en laine avec une patience et un humanisme qui feront parler de lui des générations et des générations et encore des générations plus tard - quand j'ai entraperçu donc l'éclat de son sourire et son brushing de rêve, j'ai su qu'enfin, je l'avais trouvé.
Lui, le Prince Charmant.
(j'en avais déjà un, mais- gourmande je suis- il m'en fallait deux)
non, pas lui
ni elle
Ahhhh ! le voilà ! confronté à Alberich, son ennemi juré
le Prince aimait à porter sa couronne de traviole -et d'ailleurs il disait "de traviole" parce que c'était plus cool- pour se donner un air dégagé
alors, jalouse ? (le Prince Charmant guidant le peuple...)
Chez lui, vois-tu, tout me botte : ses bottes et sa couronne en plastique, son visage figé et même, oh mystère, le petit bouton dans son dos.... J'appuie dessus, il ne se passe rien. Rien de visible. Mais va savoir si son altesse, par ce moyen discret et dans sa grande générosité, n'a pas appelé sur ma tête le Dieu des petits spectacles bricolés de fin d'année... Celui par qui, une fois tous les morceaux raccordés, naîtra là haut, à la maison, entre le rideau noir et le bord de la table, un Potins des Bois dont je n'aurais pas honte.
- Avec une brosse, elles lissèrent le pelage épais du gros ours brun qui s’étendit devant l’âtre en grognant de plaisir. Ayant perdu toute peur et toute timidité, elles s’amusèrent à l’envi avec leur nouvel ami. Il était lourd et pataud. Elles lui tiraient les poils, enfonçaient leurs petites mains dans la fourrure chaude comme un nid, ou bien, avec une baguette, le taquinaient.
Cerise sur le gâteau, je sais que mon Prince débonnaire se pliera à toutes mes envies et rentrera dans l'ours, son heure venue, sans perdre le sourire.
Non mais.